Dans le gymnase sur l’heure du midi

J’ai toujours aimé les livres. Après tout, ma mère m’emmenait avec elle à la bibliothèque pour que j’en emprunte, avant même que je sache lire… C’est à cette époque-là que j’ai décidé que quand je serais plus grande, j’allais écrire des livres.

Oui, j’avais vraiment hâte d’apprendre à lire et à écrire!

Donc, je peux dire que j’aime lire depuis que je sais lire, et que même avant de savoir lire, j’avais anticipé que j’aimerais ça.

Mais il y a une chose que je regrette aujourd’hui, quand j’y pense… Je me dis que j’aurais dû passer plus de temps à lire quand j’étais jeune, et plus particulièrement, quand j’allais à l’école primaire.

Je dînais à l’école, dans le gymnase. Et entre le moment où on finissait de manger et celui où on pouvait sortir dehors, il se passait un long moment où les jeunes jouaient au ballon et couraient partout.

Mais pas moi. Je n’avais pas d’amie qui dînait à l’école avec moi.

Et c’est là que je me dis: voyons donc, imagine tous les livres que tu aurais eu le temps de lire pendant tes 6 années à l’école primaire!!

Et pourtant, je ne m’apportais pas de livres. Je me souviens de l’avoir fait quelques fois, mais je n’en ai malheureusement pas fait une habitude.

Pourquoi? Je pense que j’avais peur que les autres se moquent encore plus de moi qu’ils le faisaient déjà s’ils me voyaient lire. Lire un livre, ce n’était pas considéré comme quelque chose de cool.

J’étais déjà «rejet», comme on me désignait si gentiment à l’époque, donc, dans le fond, le fait de lire pendant l’heure du midi n’aurait pas changé grand-chose à ma situation sociale.

Mais j’avais peur, alors je ne lisais pas.

Qu’est-ce que je faisais, à la place?

Je restais assise (ou même debout!) toute seule dans mon coin, et je fixais les murs et le plafond.

Non, ce n’est pas une joke. C’est vrai! Je restais dans mon coin et je fixais les murs et le plafond. Pas étonnant que personne ne voulait jouer avec moi, non? 😅

Je ne m’en rendais pas vraiment compte dans ce temps-là, mais aujourd’hui je réalise que j’étais bel et bien une petite fille gênée, silencieuse et bizarre, et que les autres élèves ne pouvaient probablement juste pas me comprendre. Ou en tout cas, ils n’avaient certainement pas envie d’essayer de me comprendre.

Malgré tout, n’allez pas croire que je m’emmerdais, ou que j’étais malheureuse de mon sort. Je ne lisais pas… mais j’inventais des histoires.

Je voyais des choses que personne d’autre, dans le gymnase, ne pouvait voir.

Il y avait toute une troupe de personnages qui vivaient dans ma tête (et qui ne sont pas les mêmes qui habitent dans ma tête aujourd’hui) et moi, j’imaginais leurs aventures.

Pas dans le but de les écrire… Juste pour passer le temps. Juste parce que je n’avais rien d’autre à faire que de laisser aller mon imagination.

Je ne me souviens pas de toutes les histoires que j’ai pu imaginer… Mais je me souviens d’un thème qui revenait très souvent. Dans mon imagination, le gymnase se remplissait rapidement d’eau, pour une raison obscure, et toutes les portes étaient barrées. Et donc, mes personnages devaient se servir des ballons, des cordes à danser et des autres jeux et équipements qui se trouvaient dans le gymnase pour se confectionner des radeaux et éviter la noyade.

Leur but était de rejoindre le genre de gros tuyau qui se trouvait dans un coin du gymnase, au plafond… et à partir de là, il me semble qu’ils réussissaient à trouver une solution pour sortir de la pièce, soit en brisant une fenêtre ou en découvrant un passage secret. Je ne sais plus trop!

L’histoire se finissait toujours bien.

Et c’est pour ça que je fixais attentivement les murs et le plafond: ce que je voyais, ce qui se passait dans mon imagination était beaucoup plus intéressant et captivant que ce qui se passait pour de vrai dans le gymnase.

J’avais probablement l’air d’être malheureuse et de m’ennuyer. Mais je ne l’étais pas. J’imaginais des histoires!

Malgré tout, je me dis que ça aurait été une bonne idée que je m’apporte un livre, ne serait-ce qu’une fois de temps en temps. Ou au moins, un carnet et un crayon pour écrire ce qui se passait dans ma tête…

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